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Pépin, Charles Martel, Quierzy et Charlemagne .



Pépin d'Héristal, qui infligea à Berchaire et au roi mérovingien la défaite de Tertry, était dejà de la troisième génération des maires de palais d'Austrasie. Le premier des pippinides, Pépin le Vieux , dit de Landen, son grand-père avait été le défenseur zélé de la foi chrétienne, ce qui lui vaudra la béatification. Pépin d'Héristal sera , de ce fait, naturellement contre la politique d' Ebroin qui veut abaisser les grands évêques et contre son inspirateur. Finalement, il triomphe et règnera sans autre partage que l'influence de son épouse Plectrude, de la riche lignée des francs de la région de Trêves .
Au décès du vainqueur de Tertry, les règles de succession d' un maire de palais, princeps, n'avaient pas encore ce caractère indiscutable de celle des monarques, bien connue sous le nom de loi Salique. Cette loi d'ailleurs n' en était pas une puisque sa seule expression connue réside dans un texte du 17ème siècle et on comprend que Plectrude ait cherché à écarter Charles, fils de Pépin et d'une concubine Alphaide, au profit de son propre fils Théobald. Le roi et son maire de palais neustrien ne pouvaient que s'inquiéter de la vélléité de Plectrude et de l'emprisonnement de Charles. Un premier assaut aux troupes de Théobald fut donné à Saint Jean de Cuise près de Compiègne, sur les toutes premières marches du domaine d'austrasie. Les Neustriens sous les houlettes de Chilpéric II, nouveau monarque et de Rainfroi, nouveau maire du palais, croient leur heure venue. Ils s'allient avec les Frisons et Saxons pour prendre l'Austrasie à revers et avant même le choc des armes exigent de Plectrude la restitution de la quote part du trésor revenant à la Neustrie et à la Bourgogne. C'est alors que Charles s'évade de prison . Il comprend vite la marche à suivre et , entouré de partisans, il affronte les ennemis du nord., les Frisons. Ce n'est pas une réussite sur le plan militaire mais c'est une victoire sur l' opinion publique . Charles apparaît comme le seul défenseur des francs contre les barbares et se rallie les suffrages de la marâtre Plectrude. Mais seuls les Neustriens représentent une opposition et Charles va donc se remettre en selle et se diriger vers des champs de batailles que nous connaissons bien. Près d'Amblève, puis à Vinci , l'affrontement sur les terres attenantes au Vermandois, tourne à l'avantage de Charles. Vinci, le 28 mars 717, confirme le rôle de chef d'Austrasie et, sans mal, Charles obtient le trésor d'Austrasie et la ville de Cologne, que sa belle mère tenait sous son boisseau. Dès lors, il fait flèches de tous bois, attaque les Saxons, profite de la mort du roi des Frisons pour conquérir Utrecht et confier l'évangélisation à Saint Willibrod. Le Nord contenu, il règle son compte aux Neustriens le 14 Octobre 719 entre Senlis et Soissons à Néry. N'est on pas là en plein coeur de la Neustrie sur une terre de fisc bien plus intéressante qu'une couronne ? De ces chevauchées entre Vincy et Néry , Charles gardera l'amour profond de cette vallée de l'Oise et des terres de Quierzy qui occupent idéalement la place centrale au coeur des pays francs. Car c'est lui qui contrôle les finances, c'est à dire les réserves des grandes fermes, les chevaux et les forges. Son pouvoir s'organise par le réseau de braves à qui sont confiées les villas, et par le réseau des clercs qu'il protège. Petit à petit s'édifient une chevalerie et une féodalité soucieuse de développement économique comme de salut des âmes. Par le jeu des alliances , le domaine pacifié s'étend de la Garonne jusqu'au Rhin. Les Juifs de Cordoue qui suivent les Arabes comme interprètes, changeurs, médecins trouveront un nom pour ces peuples qu'ils verront combattre : les EUROPENSES.

Charles ne s'engage pas si loin de ses terres pour rien. L'Aquitaine et la Septimanie sont encore sous contrôle des F rancs, mais les Arabes font des percées fréquentes et, porteurs d'une vision d'un monde unifié alors que le monde franc restait tiraillé depuis Clovis et Saint Augustin entre la cité des hommes et la cité de Dieu . Le même type de dilemme concerne Rome et les Lombards. Les rois lombards menacent en permanence la papauté qui serait prête à sacrifier son pouvoir temporel pour plus de sécurité spirituelle. Dès lors, la Cité de Dieu qui n'est que la communauté hiérarchisée des clercs va se rapprocher naturellement de l'organisation très matérielle des maires de palais. Il ne manque à celle-ci que l'onction divine or Pierre ne peut-il pas lier sur terre comme aux cieux ? .
La chrétienté va naître de cette conjonction pragmatique : Charles viendra aider la papauté, puis arrêtera les Arabes pour honorer la mémoire de Sainte Radégonde. Ses actions dépasseront les actions de simple police et les commandos de piraterie car elles seront "récupérées" par les clercs et la papauté pour trouver une suite aux actes des apôtres. Mais pour parler de foi religieuse au travers de faits guerriers, la description objective risquerait de troubler le lecteur, il sera donc adopté une narration nouvelle que la littérature reconnaîtra comme de la " chanson de geste". L'expression a été réductrice pour la majorité des littéraires de tous les temps. Pourtant, en notre époque de clips audiovisuels, les spectateurs que nous sommes perçoivent mieux le pouvoir évocateur des re-récréations puisque que chacun éprouve chaque jour devant son poste de télévision combien on se lasse plus vite d'une relecture que d'une rediffusion.
Charles Martel, l'intrépide va ainsi devenir dans les récits du cycle de "Guillaume d'Orange", le fantastique héros épique d'un art nouveau qui va agir comme le véritable ciment de notre patriotisme et de notre langue.
Longtemps après, le cycle de Charlemagne fera l'objet de nombreuses versions. Il faut aussi introduire ici dans les prémices de la littérature européenne, le cycle dit du Graal et de Tristan et Iseut qui mêlent si fort les accents celtiques et le combat de la foi chrétienne. La présence d'un chevalier musulman dans ce cycle établit de façon formelle que la pénétration arabe n'était plus crainte en tant que telle. Nous verrons par la suite que les premières traces de ce cycle ont été transmises par les abbayes de Saint-Quentin et du Vermandois, où résidaient encore de nombreux missionnaires irlandais, un peu nostalgiques de leur île et fort satisfaits du comportement des chevaliers francs. Les péripéties de la bataille de Poitiers en 732 ( ou 733, date soutenue par J.H Roy et J Deviosse) contre Abd El Rhaman qui y mourut ne présentent dans ce contexte que peu d'intérêt. Elle fut un peu à l'instar d'une récente guerre d'Irak où la relation médiatique rendait les faits militaires plutôt décevants. Poitiers marquera simplement la limite nord des incursions arabes et le début d'une reconquête, qui descendra jusqu'à Narbonne et la Septimanie ( Languedoc, Provence). La population des régions asservies par les maures accueillera chaleureusement les chevaliers. Pour une bonne majorité, ce sont des libérateurs. Fini, cet impôt des pirates musulmans payé par les seuls infidèles !.
La papauté se félicitera de la détermination de Charles et essaiera de l'amener à contrer les Lombards. Mais Charles qui porte maintenant le nom de Martel et qui confie ses deux enfants à des éducateurs très chrétiens, a pu apprécier la vaillance des Lombards qui se sont alliés aux combats du Sud de la France. De surcroît, par tradition franque dont les lombards sont proches cousins, le fils de Charles, Pépin est " fils lombard par les armes " et cet honneur, réservé aux monarques, donne de l'appui aux ambitions du maire de palais . Aussi, Charles recevra personnellement la chaîne du tombeau de Saint Pierre en reconnaissance de son rôle dans la défense de la foi et de la papauté. Pour ce faire, une ambassade extraordinaire sera ordonnée par le pape Grégoire II qui, avec comme légat Saint Boniface, viendra lui remettre à Quierzy. Charles, en effet, après 27 ans de règne en qualité de maire du palais d'Austrasie , et après quelques années de règne informel du fait de vacance du roi mérovingien de Neustrie depuis 737, s'installe de plus en plus fréquemment à Quierzy. Tombé malade à Verberie, c'est à Quierzy qu'il attachera son cheval et décèdera le 22 octobre 741.

Pépin est sur place. Il pourrait immédiatement revendiquer aussi le titre de roi. Il préfèrera attendre la réunion de l'Ost à Soissons pour cela. A Pâques 742, il est toujours là et c'est bien normal, son épouse Bertrade, native de Samoussy près de Laon, accouche de son premier né. Il héritera, sur place du prénom de son grand père, dont le cheval est encore là. Charles montrera vite ses qualités de cavalier, d'homme et de chrétien et deviendra le premier empereur du Saint Empire. Le Vermandois consolait ses plaies de Tertry et de Vinci par ce bel enfançon que le monde entier voudra récupérer. Des historiens jaloux prétendront qu'il est né en Inglesheim et que son empire était germanique. Cette cruelle contre-vérité se propage toujours et fausse complètement la compréhension de notre histoire.
Nous la combattons, bien sûr, avec la force de conviction de la vérité utile à tous les Européens sincères .


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